Justice: voici pourquoi Rama la slameuse doit être libérée selon son Avocat

Dans une tribune l’avocat de Rama la Slameuse , Me Paul Kéré explique pourquoi l’artiste doit être libérée ce 11 juillet à minuit. En rappel le lundi 24 Juin elle a été auditionnée et déférée à la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO) pour blanchiment de capitaux et d’autres chefs d’accusation dont  l’outrage à agent public.

Quand Loisel disait de son vivant que la procédure était la sœur jumelle de la liberté, il ignorait que « Rama la slameuse » serait bénéficiaire des nouvelles dispositions de la loi 040-2019 (portant Code de procédure pénale), promulguée le 4 juin 2019 et publié au Journal Officiel le 1er juillet 2019, donc entré en vigueur aujourd’hui 11 juillet 2019 puisqu’il faut 8 jours francs après ladite publication pour qu’une nouvelle loi entre effectivement en vigueur dans notre pays.

Quel changement apporte vraiment cette loi sur le régime des libertés individuelles au Burkina Faso ?

En effet, aux termes de ses dispositions des articles 321-15 et 321-16 de la nouvelle loi 040-2019, « La personne arrêtée en flagrant délit peut être déférée devant le procureur du Faso conformément à l’article 251-32 de la présente loi.

Le procureur du Faso apprécie s’il y a lieu des poursuites.

S’il décide de poursuivre la personne selon la procédure de flagrance, il peut délivrer contre elle un mandat de dépôt et la traduire à la première audience du Tribunal Correctionnel.

Le Procureur du Faso traduit la personne ainsi détenue dans un délai de deux semaines à une audience du Tribunal Correctionnel.

L’intéressé est immédiatement remis en liberté si le délai prescrit ci-dessus n’est pas observé. »

Par ailleurs, aux termes des dispositions de l’article 321-16 du Nouveau Code de Procédure Pénale, dans l’hypothèse où la personne détenue dans le cadre de la procédure initiée par le Procureur du Faso en matière de délit flagrant est déjà passée en audience de jugement, « Le Tribunal doit rendre sa décision dans le délai de deux mois à compter de la date de la première audience, faute de quoi l’intéressé est immédiatement remis en liberté par les soins du procureur du Faso ».

Or il apparaît indéniablement que Madame Rasmata DIALLO dite « Rama La Slameuse » est détenue depuis plus de deux semaines (depuis le 24 Juin 2019) dans le cadre de la procédure dite de flagrant délit et est donc actuellement détenue arbitrairement contrairement aux dispositions d’ordre public de l’article 321-15 du Nouveau Code de Procédure Pénale. Sa détention est, dès lors, contraire à la Loi précitée n° 0-40-2019.

Dès lors, en raison des attributions légales du Procureur du Faso, résultant de l’article 321-16 du Code de Procédure Pénale, Madame Rasmata DIALLO dite « Rama La Slameuse » doit impérativement être mise en liberté d’office selon les dispositions légales de l’article 321-15 du Nouveau Code de Procédure Pénale et ce, sans délai.

Ce ne serait que l’application exacte du Nouveau Code de Procédure Pénale publiée au Journal Officiel le 1er Juillet 2019 et entrée en vigueur huit (8) jours francs, soit aujourd’hui 11 Juillet 2019 et tous les jours qui passent constituent une violation continue de la loi par l’Etat et, notamment, par le Ministère Public représenté par le Procureur du Faso.

Conscient de ses responsabilités et de ses devoirs, pendant ces deux semaines de délai, c’est en vain et de manière loyale que le Conseil de Rama a sollicité du Ministère public la mise au rôle de ce dossier dont la poursuite en procédure de flagrant délit apparaît d’ailleurs, juridiquement et au nom du principe de l’opportunité des poursuites, sincèrement et objectivement discutable.

En effet, après avoir écrit à la Direction nationale de la police nationale pour présenter ses excuses et après avoir reçu une réponse de cette direction nationale de la police nationale, 7 mois après voici que le parquet du Procureur du Faso vient décerner deux mandats de dépôt à l’encontre de Madame Rasmata DIALLO qui a certes « déconné grave » (comme les jeunes le disent dans leur langage) mais ne méritait pas, eu égard aux préoccupations habituelles du Parquet, à mon humble avis, après 24 années d’expérience professionnelle, un tel régime pénitentiaire sévère.

Ce n’est pas parce qu’un justiciable fait du spectacle que l’institution judiciaire doit le suivre dans ses pérégrinations. D’ailleurs et pour meilleur exemple, le Juge d’Instruction de son côté l’avait intelligemment bien compris en refusant de rentrer dans ce jeu de provocation en la plaçant simplement sous contrôle judiciaire et non sous mandat de dépôt alors que l’infraction de blanchiment d’argent est puni plus sévèrement que le délit d’outrage à policier. Il convient donc de féliciter sincèrement le Juge d’Instruction qui a été d’une lucidité et d’un calme olympien car il a fait une différence entre le comportement inacceptable de « Rama la slameuse » et le dossier de sa procédure qui n’est qu’au stade des investigations. Quel professionnalisme d’un Magistrat instructeur d’ailleurs connu pour sa rigueur juridique et son intransigeance légendaire !

Ce qui est sûr, c’est qu’à la date de ce jour 10 juillet 2019, l’incarcération de « Rama la slameuse » est illégale pour être contraire aux dispositions pertinentes de l’article 321-15 du Nouveau Code de Procédure Pénale.

Donc, pour respecter cette loi, Le Procureur du Faso, (car c’est elle et elle seule que la loi a désignée) doit ordonner au Directeur de la Maison d’Arrêt et de Correction de libérer d’office, immédiatement, Madame Rasmata DIALLO. Chacun de nous sait que ces quelques jours de privation de liberté lui ont servi de leçon capitale et il convient de noter qu’elle s’est assagie significativement, sans doute par les sages conseils que n’ont pas manqué de lui prodiguer son avocat et surtout le personnel féminin de la Garde de Sécurité Pénitentiaire qu’elle respecte profondément et continuellement depuis son arrivée le 24 Juin 2019 à la MACO.

Dès lors, si cette dame n’est pas libérée d’office ce 11 juillet 2019, c’est l’hôpital qui risque de se moquer de la charité car c’est le Procureur du Faso lui-même qui contreviendrait au respect strict des dispositions impératives et pertinentes de l’article 321-15 du Nouveau Code de Procédure Pénale. Connaissant la rectitude légale habituelle de Madame Le Procureur du Faso, gageons que Madame Rasmata DIALLO sera immédiatement libérée le 11 Juillet 2019 à 00H.

C’est l’occasion de prendre l’opinion publique nationale et internationale ainsi que tous les acteurs de l’institution judiciaire burkinabè à témoin sur le respect de la loi 040-2019 portant Nouveau Code de Procédure Pénale en ses dispositions pertinentes des articles 321-15 et 321-16 par ceux qui doivent, nécessairement, faire respecter l’ordre public législatif.

Paul KÉRÉ
Docteur en Droit
Avocat à la Cour
Chevalier de l’Ordre National
Médaille d’Honneur des Collectivités Territoriales